Xavier est prêtre. Cela ne s’est pas toujours su. Le soir venant, il lui importait de ne pas laisser dans l’ombre ce qui à ses yeux a donné et continue de donner sens et consistance à sa vie. Il saisit l’opportunité offerte par l’atelier « mémoire de prêtres » récemment ouvert par la CCBF. « Le vent souffle où il veut… » : le récit qu’il nous livre témoigne d’une vie fortement enracinée dans son époque en même temps que constamment sensible à la mouvance de l’Esprit.
Alors que plus d’un en auraient été démoralisés à vie, les épreuves de l’enfance – santé, conflits familiaux, pédagogie d’un autre âge – ont été pour lui le terreau sur lequel a germé et s’est déployé le sens d’un appel que quelques accompagnateurs inspirés – Etienne Charpentier, Henri Lemaître entre autres – n’ont pu que confirmer et qui ne s’est jamais laissé empoisonner par le ressentiment.
C’est sans fausse pudeur que Xavier évoque quelques-‐uns des grands engagements qui ont ponctué son existence. Grands… pas nécessairement du fait de leur notoriété, mais en raison là encore du mouvement porteur. Ainsi l’épisode où, du grand séminaire de Laval, on le voit voler au secours de l’une de ses jeunes sœurs éloignée de la maison familiale parce qu’enceinte. Xavier obtient des responsables du séminaire qu’elle et son petit trouvent une hospitalité finalement toute évangélique chez d’autres célibataires.
Peu après son ordination sacerdotale, Xavier a épousé Marie-Christine. Soucieux de ménager les chemins de l’Esprit aussi chez les autres, il se résout à demander et à obtenir ce que l’église – Xavier refuse que l’on mette là la majuscule – continue de désigner d’une expression qui en dit long sur un certain état… d’esprit : « réduction à l’état laïc ».
Le prêtre qu’il n’a jamais cessé d’être se voue alors à la santé des corps… et donc des âmes. En hôpital d’abord puis, chaque fois accompagné de Marie-Christine et de leurs enfants à tous les deux, dans plusieurs pays d’Afrique : priorité au « soins de santé primaire », c’est-à-dire à ce qui tend à faire de chaque homme et de chaque femme autant que possible un-e acteur-e de sa propre vie.
On sera sensible au ton jamais récriminateur avec lequel Xavier s’exprime sur ce que l’on pourrait tenir pour des « occasions manquées » s’il ne fallait pas rester convaincu que « le vent, nul ne sait d’où il vient ni où il va » : ainsi de la demande repoussée d’intégrer une équipe de la mission ouvrière ou encore de la proposition à laquelle un évêque n’a jamais donné suite d’intégrer une aumônerie de prison.
La paroisse de Xavier, ce sont aujourd’hui les « quartiers » de sa ville. La retraite venue, il poursuit son engagement dans le Centre Social qu’il a fréquenté en professionnel de la santé. Puisque « l’Esprit a été répandu sur toute chair », il s’emploie à ce que chaque personne croisée laisse briller au-dessus d’elle la petite flamme qui l’inspire et fasse que les autres « l’entendent parler dans sa propre langue ».
Loïc de Kerimel
Chrétiens en Marche 72
Le Mans, septembre 2015
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